Reconstruire la ville sur la ville, portrait de notre partenaire Ginkgo
Ginkgo Advisor est notre partenaire sur le projet de logements des Sentes des Oseraies à Romainville. Jean-Marc Sanchez, responsable de la communication et Nicolas Menu, directeur de l'investissement nous parlent de leur métier et leur vision de l'immobilier.
ALIOS: Pouvez vous nous présenter Ginkgo et sa création ?
Nicolas Menu: Gingko a été initié en 2010 par Bruno Farber. Tout est parti d'un constat: La ville est parsemée de nombreuses friches industrielles et terrains pollués alors qu'il y a une tension; celle de trouver des terrains, qui sont souvent de plus en plus chers. Dans un même temps, on souhaite éviter l'étalement urbain, on veut construire de manière plus durable... Malgré tout, ces friches sont toujours là, en coeur de ville. Les villes n'ont pas les capacités financières et techniques pour les réinvestir et les promoteurs n'ont pas les moyens d'acheter sans les conditions suspensives de permis, de modification de PLU, de dépollution...
L'idée de Gingko était de répondre à cette problématique: Trouver un moyen d'investir ces terrains qui n'attendent qu'à être développés, à devenir de nouveaux quartiers. Il a donc fallu créer un opérateur privé qui avait la capacité financière et technique pour acheter sans ces conditions de dépollution et internaliser ce savoir faire. Ginkgo a donc réuni des personnalités de l'immobilier et des experts en dépollution, Bruno Farber s'est associé à Pascal Roudier et Guillaume Ribet.
ALIOS: D'où vient cette capacité financière ?
NM: La capacité financière provient d'investisseurs comme Rothschild, la Caisse des Dépôts où la Banque Européenne d'investissement. Cela nous permet d'avoir des fonds propres, de ne pas être dépendants de banques ou de financements "projets par projets" et d'être en capacité d'acheter ces terrains.
Chaque fond a une durée de 10 ans. Nous arrivons à la fin du fond 1 et sommes bien avancés sur le fond 2. Aujourd'hui, nous avons seize projets en court: Historiquement, les projets étaient concentrés en France et en Belgique mais nous nous intéressons aujourd'hui à d'autres pays européens: L'Espagne par exemple, avec un grand projet à Malaga avec l'agence Leclercq Associés. À l'avenir, nous regardons aussi vers l'Italie, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Hollande... car les problématiques de friches existent sur tout le continent, et que ce genre de fonds n'existe pas encore!
Jean-Marc Sanchez: À notre petite échelle, nous avons tous l'impression de servir à quelque chose. Notre travail permet de ne pas construire sur des terrains vierges, d'éviter l'étalement urbain. Nous travaillons bien entendu en concertation avec les villes, selon leurs besoins. Il y a tout d'abord un travail de recherche de ces sites, de se faire connaître par les municipalités, puis vient la partie technique: la démolition, le désamiantage, le tri des matériaux... Pour ensuite commencer le travail de la construction.
Marseille (13) - Legre Mante: Réhabilitation d'un patrimoine industriel historique
ALIOS: Comment travaillez-vous avec les promoteurs immobiliers ?
NM: Nous regroupons les compétences de dépollueur, d'architecte, d'ingénieur... Mais nous ne sommes pas promoteurs. Nous nous associons donc sur chaque projet à des partenaires locaux, à des personnes qui connaissent bien le territoire. C'est le cas d'Alios qui est très implanté dans le territoire du Nord-Est parisien. Alios a également une approche de la programmation, de l'environnement et de la vie associative et culturelle que nous trouvons complémentaire avec notre vision de l'immobilier. Nous n'avons pas vocation à internaliser ce savoir-faire donc nous nous associons systématiquement à des promoteurs ou des AMO indépendantes. Nous restons leur partenaire financier. Nous sommes très présents sur les phases amonts et nous laissons ensuite la partie de la construction et du développement immobilier.
ALIOS: Les questions environnementales, l'impact du covid sur nos modes de vie et de travail... quelle vision avez-vous du futur de l'immobilier ?
NM: Aujourd'hui nous essayons de nous développer sur toute la chaîne de valeur de l'impact et pas seulement la dépollution. En plus de la construction durable, nous voulons que nos projets fassent sens, aient un réel impact sur les quartier. C'est pour cela qu'on évoque aussi le coté sociétal.
Nous sommes convaincus qu'avec la crise du Covid 19 nous allons occuper les espaces différemment. L'immobilier va évoluer, les espaces de vie et de travail aussi. On parle beaucoup de "Co": "Coworking", "Coliving"... Tout cela évolue extrêmement vite et nous sommes dans un domaine ou il y a beaucoup d'inertie. À l'échelle de la rapidité de l'évolution sociétale que nous vivons, cette inertie est énorme. Il va falloir que nous nous adaptions. D'autres typologies d'immeubles vétustes vont apparaître, des immeubles de bureaux par exemple... On essaie d'être à l'écoute de ce qu'il se passe, d'être flexibles.
JMS: Notre métier va également évoluer avec les innovations technologiques qui vont permettre de nouvelles approches de la dépollution. Dans l'architecture également, de nouveaux matériaux, de nouvelles façons de voir les logements apparaissent. L'agence François Leclercq, avec laquelle nous travaillons, développe une grande réflexion autour de la taille des logements. C'est très intéressant pour nous de nous entourer de personnes qui suivent avec agilité cette évolution de vie.
ALIOS: Comment décririez vous votre équipe et votre mode de travail ?
NM: Lorsque je suis arrivé chez Ginkgo et que j'ai rencontré les associés, ils m'ont tous raconté qu'ils avaient travaillé dans de grandes maisons. Bruno avait beaucoup travaillé dans des banques d'affaires, puis chez Rothschild, Pascal Roudier chez Suez... Pour le fond Ginkgo, ils ont voulu éviter de tomber dans les carcans de la grosse société hiérarchisée, le fonctionnement en Silo. Nous essayons plutôt d'avoir une équipe pluridisciplinaire, avec des parcours très variés et complémentaires. L'horizontalité et la flexibilité sont clefs.
JMS: Nous souhaitons garder cette petite équipe même si le fond est amené à se développer. Nous préférons nous investir dans des projets et avec des partenaires en lesquels on croit, plutôt que de nous éparpiller.
WeLink, Quartier de Gerland à Lyon. Leclercq Associés, Ginkgo Advisor
ALIOS: Pouvez-vous nous présenter un de vos projets?
NM: Nous sommes en train de terminer un projet de 4,5 ha dans le quartier de Gerland à Lyon. Ce projet est assez représentatif de ce que nous entreprenons.
Nous avons acheté en 2012 une ancienne usine de Machines à laver dans ce quartier industriel peu connu des Lyonnais. Aujourd'hui nous avons pu modifier le PLU, permettre la construction d'un nouveau quartier avec 650 logements, une crèche, Deux immeubles de bureaux, deux nouveaux parcs publics, quatre nouvelles rues, un groupe scolaire... Ce projet accueille également un concept intéressant de logistique urbaine du grossiste alimentaire Métro Cash. Ils ont développé une ferme de plus de 5000m2 sur le toit de l'immeuble, ils revendent ensuite les produits directement dans l'immeuble puis livrent les restaurateurs lyonnais dans des camionnettes qui leurs sont propres. Ce concept s'inscrit dans le projet de la ville de Lyon comme "ville de la gastronomie".
ALIOS: Pourquoi le nom Ginkgo ?
NM: Le Ginkgo est l'un des seuls arbres qui a résisté à la bombe Hiroshima. C'est un peu l'image du dernier maillon pour retransformer quand tout a été détruit.